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ImagetextCYRANO DE BERGERAC

Libretto in French

Probably the best known Estonian opera is Cyrano de Bergerac by Eino Tamberg (libretto by Jaan Kross after Edmond Rostand). The performers are best from the Estonian operatic world – conductor Paul Mägi, Symphony Orchestra of the Estonian National Opera, the singers being the elite from neighbouring Finland. A must for all opera lovers.

Romantic opera in three acts and an epilogue, op 45 (1974)
Libretto by Jaan Kross
Based on the play by Edmond Rostand
Translated by Tiina Alep

Act I

1. scène: introduction et monologue de Cyrano
Cyrano: Ah-hoo!
Face à mon épée, une troupe de tueurs à gages
peut-être bien cent hommes,
tremblant dans la nuit comme l’ombre effrayée du feu!
Victoire! Victoire!
J’ai bu à la victoire triomphante,
mais le goût amer m’est resté dans la bouche,
car que peut changer à mon destin,
la plus brillante figure à l’épée?!
Mon amour secret est un ange, le plus beau des anges
et moi laid comme seul je puis l’être...
aussi brillants que puissent être mon épée et mon esprit,
mon immonde nez leur fait ombrage,
mon immonde nez.
Pourtant à chaque éclair
Une lueur apaise ma chère mémoire,
et quand il s’éveille et monte comme l’escalier
de là haut que  verra-t-elle derrière ma gueule?
Disparaît, fol espoir!
Et il disparaît, baissant les yeux –
Cet espoir qui m’a effleuré.
Il disparaît aussitôt, si sur le mur,
A la lumière de la lune, je vois l’ombre de mon profil.
 
2. scène: kavatiin de Christian
Christian: La-la-laa
Deuxième semaine à Paris et déjà tombé follement amoureux,
Cette farce n’est pas fausse du tout d’ailleurs,
Deuxième semaine à Paris et déjà tombé follement amoureux,
Mon amour est sans bornes.
Elle s’appelle Roxane,
Jusqu’ici je ne l’ai vue qu’au théâtre.
Oh, cet amour m’a donné des cheveux blancs,
Car il me manque espoir et stratégie.
Elle est si exigeante et si distinguée
Que le moindre de mes gestes est une erreur.
Ma bravoure est mon unique arme,
Pourtant en amour je me décourage aussitôt.
D’où prendre les mots, d’où prendre l’esprit?
Je n’ai pas d’idées!
La-la-laa.
 
3. scène (Ragueneau, Lise)
Ragueneau: Eh, Lise!
Viens au secours et aide à ouvrir les lucarnes.
J’ai entendu parlé un soir que l’ami Cyrano
A l’idée de se mêler à un complot dangereux.
Lise: Quelle affaire?
Ragueneau: Tu connaîs le conte De Guiche –
Cet espèce de vieux bélier arrogant!
Il a été touché dans un pamphlet par la plume du poète Lignière,
Roxane de nouveau a renoncé à l’amour du conte De Guiche.
A cause du pamphlet, De Guiche a engagé cent hommes,
Qui ont ordre de tuer Lignière sur le chemin menant à la maison.
Et Cyrano s’est mis en tête de les en empêcher.
Lise: Ce Monsieur adore faire parler de lui,
Et si un jour il reçoit un coup dans le nez,
Je te dis, qu’il le mérite!
Pourquoi tu te fais des soucis?!
Fait vite maintenant, tes poètes de pacotille seront bientôt là.
 
4. scène (Ragueneau, dame de compagnie de Roxane)
Dame de compagnie: Sacrebleu! Se promener dans la nuit, ce n’est pas chose heureuse.
Où se niche-t-il, le cousin de la maîtresse de maison?
Bonjour, Sire Ragueneau!
Puis je rencontrer ici Monsieur Cyrano?
Ragueneau: A quel sujet?
Dame de compagnie: Je ne réponds pas à n’importe qui!
Je vous l’avoue: la maîtresse de maison m’envoie.
Ragueneau: Ah, mademoiselle Roxane?!
Dame de compagnie: Oui, mademoiselle Roxane.
Ragueneau: Et où est-elle, la demoiselle?
Dame de compagnie: A deux pas d’ici,
A l’office de nuit, à la chapelle, elle y prie.
Elle m’a envoyé, j’en reviens en courant,
afin de demander un rendez-vous avec son cousin.
Cela fait longtemps que je vous attends.
Elle sera là à sept heures.
 
5. scène: arioso et scène de Cyrano (Cyrano, Lise, Ragueuneau) 
Cyrano: Elle sera là à sept heures.
Quel bonheur et quelle peur.
Quel joie et quelle torture.
Quel que soit son désir, elle sait que je suis un pauvre mortel
Je me sens si fort que je pourrais retenir la voûte du ciel,
Roxane me demande un rendez-vous!
Je sens se ranimer la flamme déjà endormie sous les cendres,
Quel que soit son désir!
Ah, les mots.
Je ne peux les sortir de ma bouche devant Roxane,
Quoique j’en garde dans mon cour des millions!
Alors que sur le papier.
J’écrirai une lettre qui soit faite de telle façon
Que je saurais chaque ligne par cour évidemment.
Eh Ragueneau! J’attends quelqu’un,
Que personne ne vienne.
Lise: Mais mon bouffon de mari l’ayant permis,
Sa troupe d’insignifiants poètes sera bientôt là!
Croyez-moi, la pièce sera vide.
Cyrano: Oui! Emmène-les avant sept heures 
Et ferme bien toutes les portes d’entrées!
Donne-moi une plume, Ragueneau!
Ragueneau: Pour vous, une plume de cygne.
 
6. scène: (Lise Ragueneau, Cyrano, 3 poètes-clochards)
Lise: Tes chiffoniers sont arrivés!
Poètes: Cher collègue!
Génie, comme nous!
Génie de la cuisine!
Oui.ça sent bon ici!
Ça sent vraiment bon ici.
Salut, Apollo qui est ici le boulanger!
Ragueneau: Honorables collègues! Ah!
Comme je me sens bien parmi vous,
Je ne comprends pas pourquoi!
II poète: Nous étions un peu en retard en ta demeure si belle,
Car la foule nous a emporté vers les portes de Nesle.
Six rustres allongés par terre et partout des blessures d’épées.
Cyrano: Six, alors? Et pas cinq?
Poètes: Qui a pu faire ça, sûrement un brave homme!
Oui, vraiment un homme courageux!
Cyrano: J’aime.
Poètes: Un seul homme... C’est connu
... a battu cent hommes.
Toute la rue pleine de poignards et autres armes.
Ragueneau: Qui pourrait être ce brave homme?
Poètes: Personne ne sait! Personne!
Que de jurons et de plaintes sortant des antres des brigands!
Cyrano: J’aime vos cheveux.
Poètes: ...comme il était brave, ce gars,
unique en ce monde.
Cyrano: Dès que je vous vois,
Envahi par la peur, je perds la tête.
Celui qui signe, c’est votre plus fidèle amoureux.
Elle la recevra de mes mains –
Pas besoin de signature.
 
7. scène: arioso de Roxane et duo avec Cyrano
Roxane: Précipite-toi à la chapelle maintenant
Et pose un cierge allumé devant l’image de la Vierge Marie
Et prie, que monsieur Cyrano ne prenne ma sincérité pour folie.
Ah, mon pas est si lourd,
Tellement haut me semble la marche du seuil de cette boutique.
Tout ce qui naît de l’amour, est toujours sincère.
L’amour me soutient et m’encourage.
Cyrano: Enfin le moment béni est arrivé.
Qui vous amène ici?
Roxane: Ah, je me découvrirais devant vous,
Je devrais toujours voir en vous le frère,
Que vous étiez pour moi,
Qui a joué avec moi au bord du lac,
Qui dans mon enfance a joué
Tous les jours avec moi.
Cyrano et Ragueneau: Oui, jadis Bergerac était notre terrain de jeux
A l’époque vos épées poussaient dans les roseaux
Les cheveux de la poupée Gabrielle étaient de filasse,
C’était l’époque des jeux
Plein de fruits amers.
Cyrano: Quant vous répondiez encore à tous mes caprices,
Vous étiez seulement une enfant, vêtue d’une simple jupe.
Roxane: Etais-je belle?
Cyrano: Oui, si mignonne et étourdie.
Roxane: Quelque fois à l’escalade vos mains se blessaient,
Votre course joyeuse vous amenait chez moi,
J’ai joué à la maman et j’ai dit d’un air sévère :
Mon garçon, encore du sang sur tes mains! Est-ce une blague?
Oh, c’est déjà trop! Où vous êtes vous blessé?
Cyrano: Ah, près de Nesle. Le jeu m’a abîmé un peu la peau.
Roxane: Montrez-la moi, je la nettoierai.
La manche est aussi tâchée de sang. Ils étaient nombreux?
Cyrano: Ah, il n’était pas une centaine.
Roxane: Racontez, si’il vous plaît.
Cyrano: Non, dites-moi maintenant ce que
Vous n’avez pas osé me dire avant.
Roxane: Oui, du passé je tire beaucoup de courage,
Et j’ose le dire maintenant.
Oui, j’aime, j’aime follement quelqu’un.
Qui n’en sait rien encore,
mais doit bientôt l’entendre.
Qui de loin, de très loin
m’aime de façon muette et m’adore fièvreusement.
Et imaginez seulement – comme par hasard
que votre régiment soit son corps de troupe.
Et son bataillon est dans votre compagnie.
Il est si tendre et subtil, l’esprit illumine son front.
Il est aussi si fier, si hautain et beau!
Cyrano: Beau aussi?
Roxane: Oui. Qu’est-ce qui vous arrive?
Cyrano: Comment s’appelle-t-il?
Roxane: Christian de Neuvillette.
Cyrano: Pas dans notre compagnie de telle personne.
Roxane: Si. A partir de ce matin.
Cyrano: Et pourquoi avez-vous besoin de moi alors?
Roxane: Les gascons sont connus pour leur terrible manie
de provoquer chaque nouveau.
Et alors?
J’ai pensé... que vous,
le plus intimidant de nos héros à l’épée
l’aideriez à se soustraire à  ces duels...
Si vous le protègiez...
Cyrano: Votre petit baron est sous ma protection.
Roxane: Vous deviendrez son ami?
Cyrano: Je vais le devenir.
Roxane: Alors, il ne participera jamais aux duels?
Cyrano: Non, jamais.
Roxane: Je vous aime pour ­ça, mon amour.
Vous êtes si brave et si beau.
Et dites-lui s’il vous plaît,
qu’il s’avise de m’écrire.
Qu’il écrive bientôt.
Cyrano: Oui-oui.
Roxane: Le temps me presse, je dois partir.
Et de votre bataille,
Ondulant partout dans la ville comme une vague,
vous me raconterez aussi, mais une autre fois.
Et qu’il écrive, n’oubliez pas...
 
8. scène (Chœur des hommes, Cyrano, Ragueneau, De Guiche, Jaloux)
Chœur: Oh-hoo... Cyrano, Eh, Cyrano!
Notre héros, notre héros! Fantastique!
Intelligent! Audacieux! Tout un phénomène!
Hourraa! Encore et encore!
Nous sommes si fiers que notre Cyrano ait ensemble toutes ces qualités
langue bien affilée et grand virtuose de l’épée!
Le conte De Guiche arrive par là!
De Guiche: Votre tour de nuit –
oh-ho, a pu offrir un spectacle fort amusant.
Pour ça je vous apporte les éloges du maréchal,
Même l’orgueuil a son charme.
Sauf que l’écho en est ici trop amplifié.
Oui, beaucoup trop.
De Guiche: Etre poète, c’est du luxe de nos jours.
Ce ne serait pas un mal si vous veniez servir dans mon régiment
Cyrano: Non, monsieur. Je ne veux pas.
De Guiche: Votre esprit peut-être
amuserait mon oncle Richelieu.
Je vous recommenderais à lui.
Jaloux: Tu deviendras célèbre!
De Guiche: Et la rime de votre ouvre me semble si raffinée.
Jaloux: Voilà, pour ton ouvre, les portes te sont ouvertes.
De Guiche: Apportez-lui cela.
Cyrano: Vraiment...
De Guiche: Pour lui tout est clair,
où changer, couper s’il le faut un ou plusieurs vers.
Cyrano: Non, mon sang se pétrifierait si dans l’oeuvre qui est mienne,
une virgule serait corrigée par un tiers.
De Guiche: Vous avez énormément de fièrté.
Cyrano: Vous l’avez bien compris?
I cadet: Tout le quai est plein d’animaux à plumes!
II cadet: Celui qui a engagé des voyoux,
Est pour l’heure fou furieux.
I cadet: Qui a pu les engager?
De Guiche: C’est moi qui l’ai fait.
Car il est clair,
qu’un noble se blâmerait, s’il punissait lui-même
une espèce d’ivrogne, un poète inapte à la Lignière.
I cadet: Des proies bien grasses
Cyrano: Vos amis pourront les obtenir maintemant de votre part.
De Guiche: Vous avez lu “Don Quichote?”
Cyrano: De A à Z.
De Guiche: Il me semble pourtant,
que vous avez omis les lignes où l’on parle des moulins.
Car, parmi  ceux qui les attaquent, certains se trouvent jetés dans la boue
par l’aile du moulin,
Et d’autres sont emportés vers les étoiles.
 
9. scène: (Christian, 3 cadets, Jaloux, Cyrano, chœur des hommes)
Cœur: La-la-laa.
III cadet: Eh, silence!
Que Cyrano nous raconte son histoire nocturne.
II cadet: Qu’il l’entende, ce museau de rien du tout!
Christian: Comment ? Quel museau.?
III cadet: Disons, qui n’est gascon ni de visage ni de sang
I cadet: On ne parle pas de corde dans la cellule de celui que l’on va pendre,
Donc vous comprenez – aucun mot?
II cadet: Son épée sert à vous faire disparaître de ce monde
Dès que vous y faites la moindre allusion!
Jaloux: Cyrano, raconte ton histoire nocturne!
Cœur: Parle, Cyrano! Oui, vas-y! Raconte, Parle!
Cyrano: Alors, bon.
 
10. scène: le récit de Cyrano (Cyrano, Christian, 2 cadets)
Je suis passé par le quai, aucun signe de vie,
un nuage de couleur sombre a caché la lune et
il n’y avait pas dans l’’obscurité le moindre rayon de lumière,
Ainsi je n’ai même pas vu
Christian: mon nez.
Cyrano: Qui est cet homme?
I cadet: Notre cadet nouveau venu, Christian de Neuvillette.
Cyrano: Aa... alors. eeh...
Sacrebleu! Bon...
J’ai dit que la lune s’était vêtie d’un nuage noir
et aussi j’ai pensé qu’en défendant cet animal
j’allais sûrement fâcher un duc ou un conte
et plus tard je recevrais un coup au...
Christian: Nez!
Cyrano: Sur la caboche,
et il est peu probable d’espérer quelque chose de bon,
si je mets mon...
Christian: Nez!
Cyrano: ... ma main dans les affaires des grands nobles.
Mais j’ai dit que cela n’effraye pas un gascon.
Accomplis ton devoir ou tu n’es pas toi-même!
Soudain là, dans le noir je reçoit un coup.
Christian: Dans le nez!
Cyrano: Au diable! Foutez le camp, tous!
I cadet: Mince alors, le tigre s’est réveillé.
Cyrano: Tout le monde, sauf celui-là!
III cadet: Et bien, il va le rosser maintenant.
 
11. scène: duo de Cyrano et Christian et scène (Cyrano, Christian, Jaloux, cadets, chœur des hommes)
Cyrano: Allez, viens m’embrasser!
Tu m’a laissé une bonne impression.
Et sache le – tu embrasses en moi le frère de Roxanne
ou presque : son cousin du côté de son père.
Christian: Oh, mon dieu!
C’est alors le ciel qui m’a aidé...
Puis-je espérer qu’elle me respecte?
Cyrano: Peut-être.
Christian: Oh, comme votre amitié m’est chère!
Cyrano: Vraiment? Cette gentillesse me semble exagérée et
même un peu effrayante.
Christian: Oh, excusez-moi!
Cyrano: Mais il est vraiment beau, ce gaillard...
Elle attend ta lettre
Christian: Alors tout est foutu!
Car quand j’écris je dévoile ma bêtise.
Une bêtise telle que la honte me tue.
Roxane est une dame exigeante.
Je perdrais tout espoir si j’ouvrais la bouche.
Cyrano: Si moi j’étais aussi beau parleur pour mon âme...
Christian: Où trouver les mots justes...
Cyrano: Je te les prête, s’il le faut!
Roxane ne serait jamais déçue, ne deviendrait jamais indifférente...
Tu veux, qu’on la séduise ensemble moi et toi?
Christian: Mais écoute –
Cyrano: Si les mots te manquent pour parler de la flamme qui brûle en ton corps,
si tu maudis ton manque de verve,
réunissons ensemble ta bouche et mes mots?
Christian: Ça t’amuserait?
Cyrano: Ça serait pour moi vraiment...
ça serait une idée magnifique.
Les poètes ont souvent payé cher leurs idées.
Je te complèterai et tu me complèteras.
Je serai ta figure, ton ombre et ton esprit.
Tu seras ma forme et moi ton esprit.
Christian: Mais la lettre? Rien que d’y penser cela me fait la peine.
D’où la prendre?!
Cyrano: Ta lettre pour elle – tiens – elle est là.
Christian: Vous l’avez déjà.
Cyrano: Oui, j’en garde plusieurs dans ma poche,
car les dulcinées sont nombreuses
et c’est pour ça qu’on apprécie toujours le mieux celles d’entre elles,
qui demeurent dans les rêves.
Christian: Mais... Est-ce que tout dans cette lettre convient à Roxane?
Cyrano: Ah oui, on ne modifie aucune ligne.
Christian: Oh mon ami!
Jaloux: Notre tigre a une auréole de Saint au dessus de la tête?!
Il a reçu une claque a une joue, maintenant il tend l’autre joue?!
II­cadet: Maintenant on peut parler de son nez, il me semble.
Quelle odeur pénère dans mon nez?
Vous l’aspirez directement dans les poumons?
Que sentez vous ici?
Cyrano: Un coup derrière la tête
Chœur: Oh – hoo, Cyrano!

Act II

12. scène: air de Roxane
Roxane: La nuit tombe et lecrépuscule enflamme le ciel
et de nouveau mon cour se gonfle d’un espoir douloureux.
Mon Dieu, je sens mon visage en feu,
mais je dois m’avouer en secret,
je dois m’avouer que c’est l’amour.
Christian, Christian!
Finalement je commence à connaître sa personnalité.
Sa muse disparaît parfois et la fraîcheur disparaît de son discours,
Mais soudain des idées formidables jaillissent de sa bouche.
Ah oui, ces petites bagatelles mais qui ont une telle importance
Et qui ne sont jamais aussi bien dites par ses rivaux.
Il me semble qu’il soit entouré d’un tension magique,
et de plus en plus, je sens dans son discours une âme profonde.
Et pourtant j’ai peur,
De Guiche me poursuit comme un nuage d’orage, comme un taon.
Et il ne s’inquiète pas du prix des tueurs à gages.
Au moindre signe de sa part, mon amoureux peut avoir
une épée plantée en sa poitrine.
Ah, Christian, mon amour,
déjà le crépuscule enflamme le ciel,
et de nouveau mon coeur se gonfle d’un espoir douloureux.
Ah Christian!
 
13. scène: duo de De Guiche et Roxane
De Guiche: J e suis venu l’annoncer:
A Arras notre attaque a échoué.
Adieu, je pars pour la guerre de suite.
Roxane: Ah oui!
De Guiche: Mais je vois que cette histoire ne
vous touche guère.
Là-bas je vais diriger un régiment.
Ce régiment où sert votre cousin,
ce malotru de Cyrano.
Eh bien, je vous jure que je le rosse cette fois!
Roxane: Christian!
De Guiche: Qu’est-ce qu’il y a?
Roxane: Je défaillis si japprends que
quelqu’un, que..part tout à coup à la guerre.
De Guiche: Mon départ semble vous soulager.
Roxane: Donc une vengance attend mon cousin?
Vous voulez envoyer mon cousin à la guerre?
Oh, misérable vengeance!     
Pour lui c’est bien sûr un plaisir.
Je saurais comment le rendre fou de haine, mais.
De Guiche: Et ça serait?
Roxane: Si on laissait un régiment de malotrus gascons traîner à Paris
quand les autres se battent!
De Guiche: Oh, la vengeance des femmes!
Il me semble que vous m’aimez encore?
Je vois une preuve d’amour
Dans votre conseil de le châtier.
Roxane: C’est bien ça.
De Guiche: L’ordre de départ des gascons restera dans ma poche.
Oh, vous me rendez fou,
Je ne peux pas partir.
Si dans votre coeur vibrent des sentiments
je ne peux pas partir.
Attendez ! Je me cache dans un monastère. Ici tout près, dans le voisinage.
La ville me croira parti.
Chez vous j’enlèverai mon masque.
Oh, permettez moi pour un jour d’être en retard à la guerre!
Roxane: Non.
De Guiche: S’il te plaît!
Roxane: Je ne peux pas.
De Guiche: Je te supplie!
Roxane: Non, car je vous désire héroïque!
De Guiche: Oh, mon cour s’arrêterait de battre!
Je pars. Adieu!
Roxane: Je vous remercie, mon ami!
 
14. scène: (Cyrano, Roxane, Christian)
Cyrano: Je vous remercie, mon amie!
Roxane: Ah, c’est vous.
Cyrano: Oui, c’est moi.
Alors, comment il va, votre bien-aimé?
Roxane: Nous sommes de plus en plus liés par le fil brillant de son esprit.
Cyrano: Est-il si brillant d’esprit?
Roxane: Encore plus brillant que vous.
Mais les mots du conte De Guiche m’ont glacé le cour.
Je prend un vêtement chaud dans ma chambre,
et je sors tout de suite.
Si Christian arrive, qu’il attende.
Cyrano: Et puis-je savoir quel thème il peut espérer aujourd’hui?
Roxane: Peu importe je vous le dis : laisser couler votre fantaisie.
Le motif sera l’amour. Improvisez!
Mais taisez-vous!
Cyrano: Je resterai muet comme une tombe.
Christian: La-laa.
Cyrano: J’ai tout compris
Je vais t’apprendre ce dont tu auras besoin aujourd’hui.
Christian: Maintenant ça suffit!
Cyrano: Tu protestes?
Christian:: Roxane s’est trahie, elle est tombée amoureuse.
Je n’ai plus peur. Maintenant je parle moi-même.
Un baiser seulement et je serai très sûr de moi.
Elle arrive.
Non, ne me quitte pas!
Cyrano: Parlez vous-même maintenant, monsieur.
 
15. scène : (Roxane, Christian, Cyrano)
Roxane: Il fait tellement beau et le soir approche.
et personne nous suit du regard.
Je vous écoute, parlez.
Christian: Je vous aime, aime.
Roxane: Sur ce sujet, oui.
Christian: .Roxane, je vous aime.
Roxane: Et que prompt soit votre esprit.
Christian: Je vous.
Roxane: J’écoute
Christian: .vous aime.
Roxane:  Et encore.
Christian: Et encore. de cette idée.
Je suis tellement ravi,
tu m’aimes bien aussi?
Puis-je le dire?
Roxane: Oh, j’ai désiré la crème,
Vous ne m’offrez que le lait.
Christian: Mais.
Roxane: Dites-moi comment vous...
Christian: Ah, de tout mon cour!
Roxane: Et c’est tout!
Et parlez-moi des nuances de vos sentiments et de tout.
Christian: Oh mon dieu,
Maintenant je ne sais que dire!
Roxane: Oh, si vous perdiez votre esprit,
si votre esprit brillant vous quittait,
ce serait pire encore,
que le fait de devenir laid.
Partez maintenant
et essayez de retrouver votre verve.
Christian: Roxane!
Roxane: Je sais que vous m’aimez!
Christian: Ah, attends!
Roxane: Adieu.
Cyrano: Quel succès, à mon avis.
Christian: Je me meurs.
Cyrano: On peut arranger les choses.
Tu ne le mérites pas, si tu veux savoir.
Mais reste devant le balcon
Et moi, de l’ombre te chuchote tout ce qu’il faut
Eh, appelle maintenant!
Christian: Roxane, oh, ciel!
Roxane: Non, non! Votre discours m’indiffère!
Christian: Aa, oh, je meurs dans la douleur de l’amour!
 
16. scène du balcon (Cyrano, Christian, Roxane)   
Cyrano: L’amour s’épanouit dans mon cœur.
Christian: L’amour s’épanouit dans mon cœur.
Cyrano: ... et unit ma verve et ma main
Christian: ... et unit ma verve et ma main
Cyrano: Ce garçon, ah mon cœur
Christian: Ce garçon, ah mon cœur
Cyrano: ... il balance dans ce berceau
Christian: ... il balance dans.
Roxane: Pourquoi trouvez-vous la rime après si long silence?
Quelle maladie bloque votre fantaisie?
Cyrano: Non, ça ne va pas!
Roxane: Oui, votre aisance d’esprit est paresseuse aujourd’hui.
Cyrano: C’est à cause de la nuit.
Mes mots dans la nuit cherchent votre oreille.
Roxane: Dans cette nuit tellement obscure
Mes oreilles sont grandes ouvertes
Cyrano: Bien sûr, vos mots glissent et descendent,
Mais les miens s’efforcent et peinent à monter.
Roxane: Du coup votre parole est devenue plus aisée.
Et vous avez une autre voix.
Cyrano: Ah oui, car jusqu’ici j’ai parlé à travers.
Roxane: A travers quoi?
Cyrano: A travers l’ivresse qui m’envahit devant vous.
Pour la première fois que je peux deviner votre silhouette,
comme une lueur là-haut – je parle sincèrement.
Roxane: Et quels mots me dites-vous maintenant?
Cyrano: Tous ces mots que l’amour apporte à ma bouche!
Toute cette gerbe de mots est pour vous!
Je t’aime, ce bonheur surpasse tous les autres!
Cet amour me rend fou!
Je t’aime!
Ah, ton nom, si doux et tendre comme le tympan d’une clochette,
et mon cour c’est la cloche.
Ah, mon cour tremble,
je ne peux pas vivre autrement,
et comme une cloche je vis de ton tintement!
Cette nuit, cet air, cette heure,
Tout ça m’étouffe:
je t’ouvre mon cour et tu as envie de m’écouter.
Ah, mes mots ont retrouvé une telle force,
que ton cour tremblera si loin là haut.
Roxane: Oui, je pleure et je tremble et j’appartiens à toi, chéri.
Cyrano: Il ne me reste qu’à mourir, que la mort arrive!
Roxane a entendu mes paroles
Roxane a aimé mes paroles et s’en est enivrée.
Je ne vous demande plus qu’une seule chose,
qu’une fois vous.
Christian: . vous m’embrassiez.
Roxane: Comment?
Cyrano: Attends!
Roxane: Vous m’en priez?
Cyrano: Oui je vous demande le plus beau des cadeaux,
mais je maudis mon arrogance.
Christian: Pourquoi?
Cyrano: Trop tôt.
Christian: Bientôt quand même.
Cyrano: Oui, bientôt quand même.
Alors, c’est mieux comme ça.
Qu’un baiser. ah Roxane, ce n’est rien,
un petit secret qui ouvre l’oreille à l’écoute,
un moment pour l’éternité où on entendrait une mouche voler,
une belle harmonie remplie de joie au goût de fleurs.
Afin d’aspirer une gorgée de votre cour
et goûter du bout de la langue une miette de votre âme.
Roxane: Ah, venez cueillir alors,
la gorgée du cour et la joie de la fleur.
Roxane: Alors venez cueillir.
Cyrano: Vas-y, grimpe!
Christian: Est-ce honnête? J’en doute encore.
Roxane: ... ce secret, la joie de fleur.
Cyrano: Grimpe, lourdaud!
Roxane: ... et la joie des cours et l’éternité du moment!
Christian: Ah! Roxane!
Cyrano: Ah! Roxane!
Je me joins à ton baiser:
sur ces lèvres d’où ta bouche bois le plaisir de l’amour,
tes lèvres baisent les mots qui sortent de ma bouche.
 
17. scène (Le capucin, Roxane, Christian, Cyrano)
Capucin: Eh, mademoiselle Roxane!
Si je distingue bien l’adresse dans le noir,
c’est la bonne maison.
Roxane: Que voulez-vous?
Capucin: Une lettre pour vous!
Roxane: Je descends tout de suite.
Capucin: Un seigneur très honnête s’est servi ici de sa plume honorable
Pour écrire un mot d’une grande importance.
Roxane: Le conte De Guiche?
Christian: Non, il n’a pas assez de courage.
Roxane: Il ose encore,
Mais c’est la fin du courage!
Ah, cousin Cyrano!
Venez, lisez ce qu’écrit notre ami le conte!
 
Je ne vous ai pas obéi. Je suis au monastère.
Un simple moine bienveillant qui ne comprend rien
 vous apportera mon message.
Votre regard était trop aimable!
Vous devez être d’accord pour que je revienne chez vous.
Vous jetterez tout le monde dehors et recevrez celui.
 
Cette lettre dit ce qui suit:
Mademoiselle, votre fièrté ne conduit nulle part,
Vous êtes obligée de céder.
C’est l’ordre du cardinal et ses arguments sont fort justifiés.
Donc ces lignes seront apportées dans vos mains
Par un capucin très discret.
Et notre désir est,
Veuillez bien le comprendre,
Que c’est lui qui bénit votre mariage.
Que cela se passe de suite!
Christian deviendra votre époux.
Je l’aménerai là-bas.
Je comprends votre douleur et serai toujours votre.
Etcetera...
Capucin: Oh, seigneur bien honoré!
Je l’ai toujours su,
Qu’il s’agissait ici de quelque chose de sacré!
Roxane: Quelle horreur!
Alors, je porterai la croix.
Essayez de trouver une raison
pour que De Guiche s’arrête ici un quart d’heure.
Cyrano: Je vais en trouver une.
Ça y est, j’ai trouvé!
 
18. scène: l’histoire farfelue des vols sur la lune de Cyrano (De Guiche, Cyrano)
De Guiche: Sacré capucin!
Aucun signe de vie.
Où pourrait-il rester?
Qu’est-ce que c’est?
D’où cet homme est tombé ici?
Cyrano: De la lune.
De Guiche: D’où?
Cyrano: Tombant de haut, on ne peut jamais savoir où l’on va atterrir,
Le point de chute reste vague.
Dites-moi, dans quel pays ma chute m’a amené,
Et à quel endroit le poids de mon derrière m’a conduit?
De Guiche: Laissez-moi passer!
Cyrano: Oh quelle surprise!
Dans ce pays tous les visages sont noirs.
Alors ce doit être l’Afrique!
De Guiche: C’est mon masque.
Cyrano: Alors cette ville là, c’est Venise.
De Guiche: Une dame m’attend!
Cyrano: En ce cas là, c’est Paris!
De Guiche: Quel bouffon, mais un bouffon amusant.
Cyrano: Et vous voulez savoir au moins.
De Guiche: Je veux passer!
Cyrano: . comment est cette lune vue de près.
De Guiche: Non, je veux.
Cyrano: ... me demander comment j’y suis allé?
Pour monter, j’ai inventé une construction
De Guiche:: Cet homme est fou.
Cyrano: Pour y aller, j’ai utilisé une machine sortie de mon imagination.
De Guiche: Cet homme est fou.
Cyrano: Je connais six façons d’aller sur la lune.
De Guiche: Ah, six?
Cyrano: Oui, six! Je connais six façons!
Je me déshabille comme une bougie
Et je me décore comme un sapin de Noël
De bouteilles en cristal emplies de gouttes de rosées.
Comme la goutte de rosée s’évaporant dans l’air grâce au soleil,
De même le soleil m’aide à m’envoler
De Guiche: C’est la première façon.
Cyrano: Avec un tube en acier rempli de poudre
je peux m’éjecter dans la galaxie!
De Guiche: Deuxième.
Cyrano: La fumée montant tel l’envol d’un oiseau –
Mon ballon, rempli de fumée, s’envole
De Guiche: Trois.
Cyrano: La lune nouvelle adore aspirer la moelle de bouf
dont je me graisse le corps.
De Guiche: Quatre...
Cyrano: Ou encore le vent m’emportera,
Si un récipient fait de miroirs est rempli d’air comprimé
De Guiche: Cela fait cinq...
Cyrano: Je connais encore la façon de s’allonger sur une plaque en métal,
De jeter du fer aimanté dans l’air.
La plaque m’emporte vers le fer aimanté comme un coup de sifflet,
Un jet encore et alors.
De Guiche: Et alors?
Cyrano: Et alors... et alors...
Monsieur, votre rendez-vous est raté. Maintenant le mariage est fait.
De Guiche: Suis-je ivre? Ce nez... Cyrano!
 
19. scène (Le capucin, De Guiche, Roxane, Cyrano)
Capucin: Quel joli couple! Et grâce à vous!
De Guiche: Faites vos adieux.
Madame, aujourd’hui encore le régiment l’emmène.
Roxane: L’emmène? A la guerre? Pourtant les cadets n’y vont pas?!
De Guiche: Dès lors ils n’ont plus le choix.

Act III

20. scène: (Jaloux)
Jaloux: Les souvenirs que l’on garde de ce terroir ne sont que merveilles
Et le son de chaque instrument est tellement mignon et suave.
Ici sont nos vallées, vaisseaux d’eau bleue de source
et la verdure du soir et le toit des maisons,
votre nuage de fumée vaporeux comme chevelure au vent.
Et cette musique qui garde le parfum du parler gascon.
Il y a tellement de tendresse dans les tonalités de l’instrument.
Notre âme, notre âme est de retour en Gascogne.
 
21. scène et air de Christian: (Jaloux, Cyrano, I et II soldat de garde, Christian)
Jaloux: Ils tirent là-bas, au diable, mes garçons se réveillent!
Leurs visages – émaciés tels des empreintes.
C’est fou, ceux qui assiègent la ville sont cernés et ils ont faim.
I soldat: Qui vient?
Cyrano: Bergerac!
II soldat: Qui vient?
Cyrano: C’est moi, espèce de sot!
Jaloux: Tu es blessé?
Cyrano: Sain et sauf.
Les tirs des Espagnols le matin ne m’atteignent pas, j’en ai l’habitude.
Jaloux: Vous êtes au front à cause de la lettre?
Cyrano: Je respecte ma promesse. Roxane reçoit souvent des lettres.
Jaloux: Et où allez-vous maintenant?
Cyrano: Ecrire une autre lettre.
Christian: Oh, Roxane, s’endormir encore
Pour encore sentir l’odeur de tes cheveux.
Car en se réveillant c’est toujours ce même sentiment,
nous nous séparons et la douleur revient.
Oh, ma Roxane, c’est grâce à toi,
que ma bouche ne connaît pas la faim,
car en partant tu m’as donné tes lèvres
et leurs empreintes sont restées sur ma bouche.
Ah, ma Roxane!
En cette nuit tempêtueuse je ne peux nier
que je sens un grand vide en mon corps et âme,
si je pense à celle qui est restée loin de moi.
Oh mon Dieu, la vie est si folle et tumultueuse
qu’un homme cherche consolation dans les rêves
quand sa dulcinée ne reçoit que des lettres,
pleines de mots sublimes mais écrits par un autre.
Ah, ma Roxane,
s’endormir encore pour te posséder
et sentir tes lèvres contre mes lèvres.
 
22. scène: (Jaloux, 2 cadets, cœur de cadets, Cyrano, De Guiche, Christian) 
Jaloux: Les bouches de mes pauvres garçons se nourrissent d’un sommeil profond.
Cadet: J’ai faim!
Jaloux: La trompette sonne l’heure du réveil et le ventre s’inquiète de nouveau.
II cadet: Mon dieu, presque mourir de faim!
Mes dents claquent!
Cyrano: Ainsi ta langue est encore plus mauvaise.
Cadet: Mon ventre gronde!
Cyrano: Que ce ventre sonne le début de la bataille!
Cadets: Faim! Faim!
Jaloux: Taisez-vous maintenant!
De Guiche arrive par là!
Cyrano: Ne déséspèrez pas.
Sortez les cartes et faisons une partie!
De Guiche: Je suis fatigué d’entendre une fois de plus
Que vos appelés ne me respectent pas.
Je ne cesse de recevoir des messages,
Où les cadets disent que je suis un vieux intriguant.
Bien, bien.
La moitié de l’armée nous a quitté cette nuit
A la recherche de provisions le long de la route.
Si l’ennemi attaque maintenant.
Jaloux: L’ennemi n’est pas au courant.
De Guiche: Si, malheureusement.
Et l’attaque commence bientôt.
Vous devez tous comprendre:
j’ai eu l’occasion d’annoncer à l’ennemi
que cette partie du front est la plus vulnérable.
J’ai fait cela pour semer la confusion.
Maintenant l’ennemi se dirige ici.
Et votre devoir sera de les arrêter.
Cyrano: Est-ce votre façon de nous témoigner votre haine? 
Si oui, je vous prie d’accepter notre profonde reconnaissance.
De Guiche: Vous avez l’habitude de vous battre contre cent hommes.
Ici je vous en offre l’opportunité.
Christian: Ecoute, Cyrano!
Tu sais ce que je voudrais:
qu’elle reçoive.
qu’elle reçoive encore quelques belles lignes, les dernières
Cyrano: Ce qui arrive
je l’avais pressenti – et j’ai écrit.
Christian: Ah oui ? Passe ça moi! Et là...
Cyrano: Quoi?
Christian: Cette petite tâche ronde?
Cyrano: Quelle tâche?
Christian: Mais c’est une larme!
Cyrano: C’est pour faire mieux encore...
... pour la beauté du jeu!
Ces lignes... tu trouves stupide le récit de mon âme de poète,
mais en les écrivant, j’avais envie de pleurer!
Ah, mourir, c’est rien du tout,
mais se séparer d’elle – c’est horrible!
Car je.nous.tu ne la verras plus jamais...
 
23. scène: (Jaloux, 2 soldats de garde, De Guiche, Roxane, Christian)
Jaloux: Quel est ce bruit!
I soldat: Une diligence. Du côté des espagnols!
Et le cri du cocher envahit le camp,
qu’on ne tire pas, c’est le courrier du roi!
De Guiche: Quoi? Le courrier du roi?
Découvrez vos têtes et mettez-vous en rang,
tous, vous les cent gaillards,
qu’il puisse entrer de manière majestueuse!
Roxane: Bonjour! La situation est difficile.
De Guiche: Le roi vous envoie?
Roxane: Oui, mon seul amour!
Christian: Mon dieu, pourquoi es-tu venue?
Roxane: J’explique tout de suite.
Jaloux: Par quel chemin?
Roxane: En traversant la ligne des Espagnols.
De Guiche: Et comment cela?
Roxane: Je suis passée. Et quand l’on m’a arrêtée,
j’ai baissé le rideau et j’ai souri.
Jaloux: Et quand ils ont posé des questions?
Roxane: Alors j’ai commis un petit pêché –
j’ai dit que j’allais voir mon amant.
Je n’ai pas eu honte de dire des sornettes,
car si j’avais dit « mon époux »
ils ne m’auraient jamais laissé passer.
De Guiche: Vous devez partir maintenant!
Nous avons seulement une demie heure.
Roxane: Non! Je reste!
Je comprends bien: la bataille commence bientôt.
Cyrano: Une dame de qualité comme héroine, ça vous amuse?
Roxane: Monsieur de Bergerac, je suis votre cousine.
Et je porte la coiffe
qui me convient le mieux sur ce champs de bataille!
Le conte de Guiche peut partir ou alors il restera exposé aux tirs!
De Guiche: C’en est trop!
Eh, apportez mon fusil, je reste ici!
Ce n’est pas mon habitude de laisser une femme en danger.
Soldats: Il reste! Hourraa, il reste!
Nous vous défendons, Madame, d’un mur inpénétrable!
Que chaque cheveu reste indemne et le chapeau aussi!
Jaloux: Que la mort nous farche en vous défendant!
I cadet: Si on pouvait grignoter quelque chose avant!
Roxane: J’ai faim, moi aussi.
Vin, hors d’ouvres, perdrix rôties –
Venez ici!
Cyrano: Ton humour, chère cousine,
C’est de l’humour noir.
D’où prendre ces plats?
Roxane: De ma diligence!
Observez mon clocher de plus près.
Il vous salue déjà sous son chapeau.
Homme de mérite, voici mon cuisinier.
Et c’est ma dame de compagnie.
Soldats: Oh, Ragueneau!
Oh notre fée bienveillante!
 
24. scène: chanson du festin de Ragueneau et de la dame de compagnie (Ragueneau, dame de compagnie, chœur des hommes)
Ragueneau: Messieurs, avec ces plats je vous salue!
Mes honorables messieurs, avec ces boissons je vous salue!
Honneur aux perdrix, au dindon et au porc 
Et comme le point sur le “i”, suivi de plats rôtis,
Ici lchope de bière, ici cruche de vin, s’il vous plaît,
Arrosons, buvons avant, au milieu et à la fin du repas.
Cœur: Avant, au milieu et à la fin!
Dame: Messieurs,
Qui pourra deviner
Quel plat mettra fin
à notre histoire de déjeuner miraculeux?!
Prenez, savourez plats et boissons,
Prenez, goûter plats et boissons,
Puis monsieur Ragueneau veut offrir encore quelque chose
pour la fin devinez quoi?
Cœur: Gâteaux aux amandes, d’un goût exquis!
Dame, Ragueneau: Gâteaux aux amandes parfumés et bien croustillants!
 
25. scène du festin et duo (Roxane, Christian, Ragueuneau, dame de compagnie, chœur des cadets)
Cœur: La-la-laa.
Dame: Vous désirez encore un plat?
Ragueneau: Une gorgée de vin?
Dame: Ne vous précipitz pas!
Vous mangez trop vite!
Christian: Dis-moi, qu’est-ce qui t’amène ici?
La route est si dangereuse, je ne veux même pas y penser,
Tu as traversé des champs de batailles et des coups de fusil.
Ragueneau: C’est ta faute –
C’est à cause de tes lettres!
Chrisitan: Ah, ces quelques lettres?!
Dame: Désirez-vous encore un plat ou du vin?
Ragueneau: Honneur aux perdrix!
Dame: Honneur au dindon!
Ragueneau:  Honneur au porc!
Ragueneau, Dame: Et avant, au milieu, à la fin, arrosez avec du vin!
Roxane: J’ai lu tes lettres, mon amour, encore et encore
Car chaque feuille était comme un pétale tombé de ton cour,
Et tes paroles sont parfumées d’un amour,
si vrai, si bon et puissant!
Christian: Et tu es venue maintenant.
Roxane: Oh mon amour, mon maître, mon époux!
A genoux devant toi je suis venue m’excuser
Pour t’avoir méprisé au début,
Quand je t’aimais seulement pour ta beauté.
Christian: Roxane, et maintenant?
Roxane: Ton âme l’emporte sur ton brillant physique
Et maintenant je t’aime pour ton âme.
Et non pour ta beauté qui m’a ensorcelée,
Maintenant je vois clair,
Je ne vois plus ta beauté!
Christian: Ah, Roxane, cet amour me fait peur,
Je voudrais un amour plus simple.
Pouvoir te séduire par.
Roxane: ce charme qui a séduit des femmes auparavant.
Comme je t’aime maintenant,
C’est mille fois mieux.
Christian: Non, Roxane, c’était mieux avant!
Roxane: Mon amour, tu ne comprends rien,
maintenant mon sentiment est vrai et entier.
C’est ton âme qui t’a créé,
Te rend si cher et moins futile.
Christian: Oh, tais-toi!
Roxane: Je t’aimerais et je t’adorerais,
Même si tu perdais toute ta beauté
Christian: Même si j’étais laid?
Roxane: Oui, je le jure!
Christian: Oh, mon dieu.
Roxane: Tu devrais être ravi...
Christian: Oui...
Roxane: Qu’est-ce qu’il y a?
Christian: Un moment.
Quelques mots..., ah, rien
Roxane: Quoi?
Christian: Ces gaillards là-bas
Seraient plus courageux face à la mort,
Va leur offrir ton sourire.
Vas-y, ma chérie.
Roxane: Bon, j’y vais.
 
26. scène: mort de Christian (Christian,Cyrano, Roxane, Jaloux)
Christian: Cyrano, Eh, Cyrano!
Roxane ne m’aime pas!
Cyrano: Comment ça?
Christian: Elle aime mon âme, donc elle t’aime, toi!
Et toi tu l’aimes aussi.
Tu l’aimes donc?
Cyrano: Oui.
Christian: Quelle folie
Cyrano: Quelle folie furieuse!
Christian: Dis lui que tu l’aimes!
Cyrano: Jamais! Regarde mon visage!
Christian: Dis lui la vérité, qu’elle fasse son choix en toute liberté.
Cyrano: Non! pourquoi cette souffrance!
Christian: Qu’elle m’aime tel que je suis.
Si non. Non!
Je vais là où est le bataillon.
Dis lui tout, qu’elle fasse son choix. Roxane.
Cyrano: Ah, attends un peu!
Roxane: Qu’est-ce qu’il y a?
Christian: Roxane, écoute.
Cyrano a quelque chose d’important à te dire.
Cyrano: Il est parti, parti comme une flèche!
Roxane: Il ne m’a pas cru peut-être.
Je ne comprends pas –
Cyrano: Mais vous avez dit la vérité?
Roxane: Oui, je l’aimerais laid aussi
Cyrano: Même aussi laid qu’une gueule, qu’un masque?
Roxane: Il sera toujours le plus beau pour moi.
Cyrano: Vous l’aimeriez vraiment?
Roxane: Peut-être plus encore
On a tiré soudain...!
Cyrano: Est-ce possible?
Et le bonheur est là?
Vraiement? Roxane, je.
Jaloux: Cyrano!
Cyrano: Qu’est-ce qu’il y a?
Jaloux: Silence!
Cyrano: Ah!
Roxane: Qu’est-ce qu’il y a?
Cyrano: Je ne peux plus le dire!
Roxane: Christian!
Jaloux: Première balle.
Cyrano: J’ai dit, elle n’aime que toi, que toi.
Roxane: Christian, mon cher.
Jaloux: L’attaque recommence
Roxane: Sa poitrine se refroidit
Son teint est blanc comme la mort.
Une lettre cachée près de son cour, pour moi!
Jaloux: Tirez!
Cyrano: Roxane, adieu!
Jaloux: Faites feu! 

Epilogue

27. scène: (chœur des femmes, dame de compagnie, Jaloux, Roxane, Ragueneau, Cyrano)
Chœur des femmes: Te solatium et refugium, Virgo Mater Maria,
tu solatium et refugium.
Virgo Mater Maria, virgo Mater Maria.
Quid optamus, per te speramus ora, ora pronobis!
Tua gaudia et suspiria Juvent nos, o Maria!
In te speramus, ad te clamamus ora pronobis!
Virgo Mater Maria.
Ave Maria, gratia plena,
Dominus tecum,
benedicta tu in mulieribus,
et benedictus fructus ventri tui Jesus
Sancta Maria, Mater Dei,
ora pro nobis peccatoribus,
nunc et in hora mortis nostrae. Amen. 
Dame: Je vous salue, Monsieur Jaloux.
Jaloux: Si cela vous ne dérange pas,
vous pourriez apportez mon message à Madame Roxane
Jaloux: Elle arrivera tout à l’heure.
Jaloux: Alors nul besoin. J’attends tout simplement.
Rien n’a changé?
Dame: A propos de Madame? Non, rien.
Depuis quinze longues années elle porte une robe de deuil,
Et dans sa poche la dernière lettre de Christian,
Non, rien n’a changé.
Jaloux: Et Cyrano?
Dame: Il n’a pas changé, toujours ponctuel, visite Madame, disons,
il apporte le journal.
Une fois par semaine il apporte à Madame
Toute une brassée de nouvelles.
Jaloux: Si vous voyez Cyrano avant moi,
De façon discrète
Prévenez-le de la part du maréchal De Guiche et de ma part.
Plusieurs personnes le verraient mieux mort que vivant
Et le maréchal aujourd’hui a entendu au palais que
Si’il est encore vivant, il mourra bientôt par accident.
Dame: Mais c’est horrible.
J’appelle Madame.
Jaloux: Ne lui dites rien.
Pour elle, un souci de plus.
Ragueneau: Monsieur Jaloux!
Mon dieu, j’apporte une terrible nouvelle.
Ce matin en allant chez notre pauvre ami...
Je le vois sortir dans la rue, je le suis, je regarde:
Sous la fenêtre où il passe,
Un rustre laisse glisser de ses mains un lourd bloc de chêne.
Le bloc atteint Bergerac.
Jaloux: Assassins!
Ragueneau: Je cours comme le vent,
Il est tombé à terre
Et un trou, un grand trou au front.
Seul, à moitié mort, il gît sur son lit!
Se mettre debout, c’est jouer avec la mort.
Roxane: L’horloge a vainement sonné l’heure de son arrivée
Et on n’entend pas le bruit de sa cane
Comme depuis quinze ans, chaque semaine, à cet instant.
Roxane: Vous n’avez jamais été en retard ces quinze dernières années
et aujourd’hui -
Que se passe-t-il?!
Cyrano: Oui, c’est étrange!
Je tremble de colère, quelqu’un est venu me voir.
Roxane: Qui?
Cyrano: Un étranger fort ennuyeux
Roxane: Quelqu’un que je connais?
Cyrano: Non, non.
Roxane: Jeune ou vieux?
Cyrano: Je dirais, sans âge.
Roxane: Et vous?
Cyrano: Je lui ai montré la porte et dit: Monsieur je m’excuse
J’ai une visite à faire
Et je ne voudrais pas y renoncer.
Pourriez-vous vous promener une heure?
Roxane: Qu’est-ce qu’il y a?
Cyrano: Non, rien. les douleurs s’apaisent.
Roxane: Mais qu’avez vous?
Cyrano: Ah, les blessures de l’époque d’Arras,
Qui me..., vous le savez bien.
Roxane: Mon ami, bien sûr que je sais...
 
28. scène: mort de Cyrano (Roxane, Cyrano, Jaloux, Ragueneau, chœur des femmes)
Roxane: Dans la lettre jaunissante de Christian,
Ma blessure est là
Et encore des larmes et du sang.
Cyrano: Vous avez dit une fois – pardonnez-moi,
Si je la lisais.
Roxane: Vous voudriez.
Cyrano: Oui, aujourd’hui je voudrais.
Adieu, je part maintenant, Roxane.
Roxane: Vous lisez à haute voix?
Cyrano: Je sens que je vais mourir aujourd’hui,
Et tous ces mots que je n’ai pas dit,
Cet amour non exprimé me fait souffrir.
Le moment des adieux, je sens que ce moment est arrivé.
Roxane: Vous lisez, mais...
Cyrano: ... je voudrais crier
Je crie adieu mon amour, mon cher amour.
Roxane: Cette voix, il me semble l’avoir déjà une fois entendu.
Cyrano: Mon cour ne vous a pas quitté un seul moment
Et il sanglote maintenant –
Encore agonisant il résonne de votre nom, Roxane!
Roxane: Comment pouvez-vous lire, il fait si noir?
Tout ça, c’était donc vous?
Cyrano: Non, Roxane!
Roxane: Si, tout à coup...
Seulement maintenant je comprends tout!
Cyrano: Je n’étais pas.
Roxane: Je comprends maintenant
Votre généreux mensonge:
C’étaient vos lettres,
C’étaient vos mots si chers!
Cyrano: Je jure.
Roxane: Et cette voix. dans la nuit,
Votre âme m’a fait trembler
Que peut-il bien encore nous arriver après un si long moment.
Pourquoi vous n’avez rien dit pendant quinze ans,
Et vos larmes si expressives dans la lettre.?!
Cyrano: Mais c’est le sang de Christian
Ragueneau: Quelle sottise!
Il s’est mis debout,
C’est la fin, Madame
Roxane: C’est donc cela qui vous oppresse depuis tout à l’heure?
Cyrano: Je ne pouvais pas lire les nouvelles:
La dernière parmi elles –
Qu’aujourd’hui votre cousin Cyrano a été tué par un bloc de chêne
Roxane: Oh, je n’aimais qu’un seul être et je le perds deux fois!
Cyrano: Pardonnez-moi maintenant, je suis pressé,
La lune m’envoie déjà ses rayons
Je m’envolerai vers son glacial éclat
Pas besoin d’inventer une machine cette fois.
Non, pas sur le fauteuil!
Ne me soutenez pas!
Si la mort doit venir, je l’attends bravement.
Et je garde mon épée.
Qui êtes-vous tous?
Vous êtes nombreux, quelle horreur!
Mes anciens ennemis –
Je ne vous reconnaîs pas?
Mais si. Tiens, mensonge, tu le mérite,
Et le compromis, les préjugés, la timidité, la stupidité, l’humilité,
Tiens, encore un coup! Prends ça!
Je sais que je suis vaincu et j’agonise,
Mais pourtant je lutte, je transperce, je découpe et je me bat.
Vous m’arrachez tous mes lauriers,
Mais il y a quelque chose dont l’éclat est intouchablel
Qui me reste – même à moi.
Roxane: A quoi pensez-vous?
Cyrano: Aux plumes de mon chapeau.

CD “Cyrano de Bergerac”

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